L'importance d'être précis

Une jeune femme d’une vingtaine d’années avait récemment commencé à travailler dans une école maternelle et s’apprêtait à entamer la dernière semaine, la plus chargée, de son année scolaire…

Une jeune femme d’une vingtaine d’années avait récemment commencé à travailler dans une école maternelle et s’apprêtait à entamer la dernière semaine, la plus chargée, de son année scolaire.

«Toute ma vie, je me suis plainte», dit-elle. «Cela fait partie de ce que je me suis toujours considérée comme étant. Je savais que les exigences seraient plus élevées au cours de cette dernière semaine d’école. Et je savais par expérience que mon attitude la gâcherait avec un nuage sombre de ressentiment. Je commencerais la semaine en souhaitant simplement qu’elle se termine. J’ai décidé de formuler l’objectif de ne pas écouter ce ressentiment et ces plaintes».

Un bon diagnostic est la moitié du remède. Notre praticienne réagit judicieusement à quelque chose de spécifique qu’elle a observé chez elle. Il s’agit d’un schéma qu’elle connaît bien ; elle l’a vu à maintes reprises. De plus, elle concentre ses efforts sur un domaine précis, à savoir son travail avec les enfants. Il y aura certainement d’autres aspects de sa journée qui pourraient l’amener à se plaindre – la circulation, le temps, la famille, etc. – mais elle recrute prudemment toutes ses ressources pour une seule bataille dans cette guerre plus large. Une focalisation trop large est une façon de vaincre notre volonté naissante ; une autre est de la soumettre à la perspective de travailler indéfiniment sur un objectif. C’est pourquoi notre praticienne limite son objectif à une semaine. Peu importe qu’elle se soit plainte toute sa vie et qu’il soit certain qu’elle continuera à se plaindre au-delà de cette semaine. Elle peut toujours remettre son objectif à une autre semaine, mais cela ne doit pas la préoccuper pour l’instant. En limitant la portée de son objectif à un lieu et à un moment précis, notre praticienne a réduit un défi écrasant à quelque chose de concret et de mesurable.

«Au début, il était extrêmement difficile de résister à l’habitude de se plaindre», poursuit-elle. «Les raisons de me plaindre ne cessaient de faire surface, réaffirmant mon habitude. De plus, dès le premier jour, ma détermination a été déstabilisée. J’ai été chargée de lire une histoire aux enfants à la fin de chaque journée. Nous terminons toujours nos journées par de la musique et des histoires, mais je n’avais pas prévu d’être chargée de cela. Cela a déclenché en moi des réactions fortes et contradictoires. D’une part, je me plaignais comme d’habitude de me voir confier des responsabilités supplémentaires au cours d’une semaine déjà bien remplie. D’autre part, je rêvais à la façon dont je pourrais surpasser mes collègues en racontant des histoires et conquérir les enfants. Il y avait donc maintenant deux coupables à surveiller: la plainte et le désir d’impressionner. J’ai dû adapter mon objectif à cette nouvelle situation. Chaque fois que j’avais envie de me plaindre ou que je commençais à fantasmer sur mon succès à venir, je devais résister à l’une ou l’autre de ces tentatives.

«Mon objectif m’a sauvé la vie. Au fur et à mesure que la semaine avançait, j’ai pu constater que la tendance à me plaindre était distincte de moi-même. Même lorsque j’y tombais, j’avais hâte de me relever, de me dépoussiérer et de retrouver mon objectif. Cela a donné une toute nouvelle dimension à la semaine. Ma journée se composait désormais de deux couches, les événements qui se produisaient à l’extérieur et les événements qui se produisaient en moi. J’ai vérifié tout ce que l’on peut tirer d’un travail que l’on jugeait auparavant trop routinier, que l’on considérait à tort comme la source de sa propre monotonie. Chaque jour qui passait, je devenais enthousiaste à l’idée d’aller travailler, de tester mes compétences nouvellement acquises et de me prouver que je pouvais aller au bout de mes obligations sans me plaindre.»

Nous nourrissons une forte résistance à apporter de la précision dans notre travail. Nous espérons avancer en restant dans le vague. Mais tant que nous n’aurons pas formulé ce qui nous retient exactement, nous ne pourrons qu’appliquer des solutions génériques. Aucun médecin n’essaierait de traiter ses patients en utilisant un plan générique pour tout le monde. Chaque cas aura son propre diagnostic et son propre remède. De la même manière, nous ne pouvons pas espérer résoudre nos défis internes uniques avec une approche unique. C’est là que réside l’importance du travail de janvier.